Sommaire : |
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Les Principaux royaumes indépendants : |
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Autres principautés indépendantes : |
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Première principauté iranienne formée au sein de l'Empire abbasside. Cette dynastie de gouverneurs du Khûrasan, jouit dans son domaine d'une semi-indépendance tout en restant fidèle au califat abbasside.
Quand le calife al-Mamûn était revenu à Bagdad en 819, quittant définitivement sa résidence de Merv, il avait confié, en remerciement de ses loyaux services, le Khûrasan avec résidence à Merv (820), au général Tâhir ibn al-Husayn (821-822), commandant en chef de l'armée, qui avait largement contribué à la victoire d'al-Mamûn sur son frère al-Amîn et au siège de Bagdad en 812-813 et à son accession au califat. Sa charge de gouverneur devint héréditaire et, à sa mort, en 822, son fils, Talha ibn Tâhir (822-828), lui succéde. Dès lors, les Tahirides sont pratiquement indépendants sans rompre avec le pouvoir central ; ils mentionnaient le nom du calife dans la "khutba" (prône) et inscrivaient son nom sur les monnaies.
Sous Abd Allah (828-845), le second fils de Tâhir, qui avait pris Nishapur comme capitale, les Tahirides dominèrent le nord de l'Iran jusqu'à Rayy (l'actuelle Téhéran), le Kirman et les territoires situés aux confins occidentaux de l'Indus. Ils s'efforcèrent également de juguler les révoltes menées au Sijistan sous l'égide des Saffarides, mais ils échouèrent dans cette dernière tentative. Leurs possessions commencèrent à leur échapper sous Muhammad (862-873), le fils de Tahir II (845-862), moins habile que ses prédécesseurs, et ils disparurent brusquement sous les coups des Saffarides. En 873, ceux-ci, sous Yaqûb ibn al-Layth, entrèrent dans Nishapur et firent prisonnier le roi, ce qui entraîna la chute de leur Dynastie.
Les Tahirides |
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Tahir Ier ibn al-Husayn : | 821-822 | |
Talha : | 822-828 | |
Abd Allah : | 828-845 | |
Tahir II : | 845-862 | |
Muhammad : | 862-873 | |
À l'occasion de la crise que le califat abbasside a traversée au IXe siècle, pendant les années dites d'anarchie à Samarra, où les califes ont été à la merci de leur armée (861-871), certaines des puissances locales ont fait admettre leur existence ; elles ont même dépassé leur cadre d'origine avec les Saffarides.
Les Saffarides, qui détruisirent les Tahirides, sont comme ces derniers des Iraniens. C'étaient des artisans chaudronniers (saffar, ce qui donna leur nom à la dynastie) qui avaient pris la tête des corporations de métiers dans la province du Sistan (Sijistan), une province frontalière entre l'Afghanistan et l'Iran actuels, pour résister aux menées des Kharidjites, qui y étaient nombreux et fort actifs. Comme ils se montraient efficaces, le gouverneur leur octroya un commandement officiel. Ils s'en servirent comme base pour assouvir leurs ambitions.
Le fondateur, Yaqûb ibn Layth al-Saffâr, (867-879), originaire du Sijistan, avait organisé une petite armée à caractère populaire dans cette région. Il réussit d'abord en 867, à se rendre maître de la province ; puis il entreprit diverses expéditions contre les Tahirides du Khûrasan, s'emparant de Hérat, de Balkh et de Nishapur, leur capitale, en 873, et annexa leurs territoires ; mais il ne put se faire reconnaître par le calife comme gouverneur. Il attaqua alors le gouverneur du Fars et le vainquit, avant d'être refoulé au Khûzistan où il mourut en 879.
Son frère, Amr ibn Layth, qui, ayant fait la paix avec le calife, obtint le gouvernement des anciennes provinces des Tahirides. Reconnu gouverneur du Khûrasan et du Sijistan en 893, il entra bientôt en lutte avec les puissants Samanides de Transoxiane et, à la suite de sa défaite, en 900, par Ismaïl ibn Ahmad, fut envoyé prisonnier à Bagdad où il fut exécuté en 902. Les Saffarides furent alors contraints de restituer le Khûrasan et d'être confinés dans la région du Sistan où leur rôle était réduit à celui de vassaux des Samanides.
Le règne des Saffarides prit fin quelques années plus tard avec l'occupation de leur territoire par les Samanides en 912, et celle des Ghaznévides en 1003. Ils ne disparurent pas pour autant, mais ils perdirent leur souveraineté et furent relégués au Sistan, où ils continuèrent à jouir de quelque autorité sous les Samanides, puis sous les Seldjoukides et les Mongols.
La cour de Zarandj, leur capitale, a été, comme celle de Boukhara, un centre de vie culturelle.
Les Saffarides (jusqu'à la conquête ghaznévide) |
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Yaqûb ibn Layth al-Saffar : | 867-879 | |
Amr ibn Layth : | 879-901 | |
Tâhir ibn Muhammad ibn Amr : | 901-908 | |
Layth ibn Ali : | 908-910 | |
Muhammad ibn Ali : | 910-912 | |
Amr ibn Yaqûb ibn Muhammad ibn Amr : | 912-913 | |
Ahmad ibn Muhammad ibn Khalaf ibn Layth ibn Ali : | 922-963 | |
Wali ad-Dawla Khalaf ibn Ahmad : | 903-1003 | |
Occupation ghaznevide : 1003 |
Les Samanides étaient les descendants d'un chef de village iranien de la petite ville de Saman de la province de Balkh, en Bactriane, Sâmân Khodâ, dont les quatre petits-fils obtinrent en 919, divers gouvernements, au temps du calife al-Mamûn, qui voulait les récompenser pour leurs bons et loyaux services. L'un d'eux, Ahmad, gouvernait le Ferghana ; Samarcande, qui relevait aussi de l'autorité de la famille, fut confiée par lui à son fils Nasr, et celui-ci la délégua à son tour à son frère Ismaïl Ier ibn Ahmad (892-907), ce dernier prit rapidement le contrôle de la Transoxiane et du Khûrasan et s'y installa comme gouverneur indépendant, choisissant Boukhara comme capitale, lorsque la ville en 874, révoltée contre l'administration tahiride, se chercha un nouveau maître ; c'était l'époque où le mouvement saffaride parti du Sijistan agitait l'Orient et que les Tahirides étaient en plein déclin.
Ismaïl plus énergique que Nasr, devint vite l'émir dominant de la famille samanide et sut rendre au califat l'éminent service de le débarrasser, en 900, du Saffaride Amr ibn Layth qu'il vainquit près de Balkh (Bactres) et envoya prisonnier à Bagdad. Il annexe ainsi les possessions des Saffarides et, du même coup, celui des Tahirides. Les Samanides étaient désormais les émirs reconnus de l'Orient iranien et les fondés de pouvoir du calife, seule autorité légale en Islam.
Avant la mort d'Ismaïl en 907, tout le Khûrasan était assujetti jusqu'à Rayy, et une offensive avait été menée au nom du califat sunnite contre les Imams zaydites du Tarabistan ; en Transoxiane, les princes locaux leur étaient soumis et les Turcs étaient repoussés plus loin vers le Nord. Ismaïl avait été le fondateur de l'émirat.
Son fils, Ahmad II, poursuivit l'œuvre paternelle en étendant sur le Sijistan saffaride la domination de sa famille en 912, mais il disparut prématurément en 914, assassiné par sa garde.
Le jeune Nasr II (914-943), âgé de huit ans, se maintint au pouvoir à la tête de l'émirat, en dépit des révoltes des oncles ou des frères, grâce aux talents des vizirs. L'émirat samanide est alors à son apogée, et ses possessions avaient été étendues à l'Iran oriental (Sistan, Kirman, Tabaristan) et à l'Afghanistan central. Mais en 943, peu de temps avant de mourir, Nasr II, dont la conversion au chiisme avait provoqué des troubles graves, dû abdiquer en faveur de son fils Nûh Ier (943-954), sous la pression des officiers de la garde. Le pouvoir samanide, à l'exemple de tous ceux de l'Orient musulman de l'époque, recrutait ses soldats parmi les mercenaires turcs convertis à l'Islam et dont certains allaient être à l'origine de la ruine de la dynastie, au profit de nouvelles dynasties turques.
Après la mort de Nûh Ier en 954, l'influence des grands officiers turcs devint prépondérante à la cour, auprès de son fils, l'émir Abd al-Malik Ier (954-961), sous la conduite du chef de la garde, le hadjib Alp Tidjin, à qui finalement fut confié, en 961, le gouvernement du Khûrasan ; mais comme ce fut un autre parti turc qui l'emporta à Boukhara, quelques mois plus tard, lorsque l'émir mourut, et arriva au pouvoir l'émir Mansûr Ier ibn Nûh, Alp Tidjin se retira de Nishapur sur Ghazni où il se retrancha pour créer un pouvoir militaire autonome dans les monts d'Afghanistan. Les émirs turcs étaient devenus les vrais arbitres du pouvoir. Boukhara reste néanmoins encore un important centre d'autorité et les ambitions buwayhides sont contenue à l'ouest, mais une autre menace va venir des Turcs musulmans Karakhanides.
L'équilibre apparent dans lequel vivait l'émirat samanide prît fin en 976, avec la mort de l'émir Mansûr Ier. Le jeune Nûh II ibn Mansûr lui succéda à l'âge de treize ans, alors qu'à l'Ouest c'est l'apogée de la puissance bouwayhide, sous Adud ad Dawla Fâna Khûsraw, qui triomphe au Tabaristan ziyaride, qu'il occupe jusqu'au Kirman.
En 991, l'État samanide, miné de l'intérieur par les ambitions d'officiers turcs, n'est pas prêt à résister lorsque les troupes turques karakhanides pénètrent sur son territoire ; et, quelques mois plus tard, Boukhara fut occupée (992) ; seule la mort subite du prince karakhanide, Bughra Khân, permit à Nûh II de retrouver sa capitale. Mais les émirs turcs avaient décidé d'en finir. Nûh II fit appel au chef militaire au pouvoir à Ghazni, Sebûk Tidjin ; en 994, les rebelles furent battus, et le gouvernorat du Khûrasan fut confié au fils de Sebûk Tidjin, Mahmûd.
Lorsqu'en 997, disparurent à la fois Nûh II et Sebûk Tidjin, la situation avait été stabilisée et des relations normales rétablies avec les Karakhanides ; mais le pouvoir réel des Samanides ne dépassait plus guère la région de Boukhara et de Samarcande. En fait, la mort de Nûh II et de Sebûk Tidjin provoqua la crise finale. Mahmûd ibn Tidjin dut quitter Nishapur pour aller revendiquer à Ghazni la succession de son père. Un officier turc le remplaça, tandis qu'à Boukhara Mansûr II ibn Nûh vivait sous la tutelle d'autres officiers en relation avec le prince karakhanide. Lorsque Mahmûd eut assuré son pouvoir à Ghazni, il voulut regagner son gouvernement du Khûrasan ; les officiers turcs de crainte que l'émir Mansûr ne retrouve l'appui de l'armée de Ghazni, le déposèrent et l'aveuglèrent, le remplaçant par son jeune frère Abd al Malik II. Mahmûd intervint alors en vengeur de l'émir déposé et occupa tous les territoires au sud de l'Oxus. L'émir karakhanide s'attribua la Transoxiane ; ses troupes avaient occupé Boukhara (999) sans résistance.
Un dernier frère de l'émir Mansûr, Ismaïl, s'échappe de la prison karakhanide, où il était détenu, tenta par la suite de retrouver son pouvoir, mais ce fut en vain. L'émirat samanide n'en disparut pas moins en 999, emporté dans les remous d'un dernier coup d'état et de l'invasion karakhanide. Ces derniers s'installent définitivement à Boukhara, tandis que l'ex-Khûrasan et les autres pays d'en deçà de l'Oxus passent sous le contrôle des émirs de Ghazni. Le dernier membre de la famille, Ismaïl, qui avait pris la fuite, mourut en 1005. L'émirat samananide a donc prit fin à l'Est avec le siècle, victime, en grande partie, des ambitions des militaires de métier d'origine servile, qu'il avait, plus que tout autre pouvoir en Islam, contribué à produire car tout laisse à penser qu'ils auraient été à même de résister au grand État turc musulman qui venait de se former dans les steppes sous le nom de Karakhanides, "les Khans Noirs", c'est-à-dire du Nord.
On rattache au nom des Samanides l'idée de renaissance iranienne, associée au volet dynamique du classicisme musulman sunnite. Par sa durée, l'étendue de ses possessions et sa civilisation, la période samanide a représenté l'apogée de cette renaissance iranienne. C'est aussi un des rares moments où la Transoxiane fut le centre d'une entité politique majeure du Moyen Orient, avec Boukhara pour capitale. C'était le premier vrai royaume iranien musulman.
Généalogie des Samanides |
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Sâmân Khodja | |
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Asad | |
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| Nuh (819-841) Samarcande |
| Yahya (819-855) Shash (Tachkent) |
| Elyas (819-856) Hérat |
| Ahmad ibn Asad 819-864) Ferghana | |
| Nasr Ier (864-892) |
| Ismaïl Ier (892-907) |
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| Ahmad II (907-914) |
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| Nasr II (914-943) |
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| Nuh Ier (943-954) | |
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| Abd al-Malik Ier (954-961) |
| Mansur Ier (961-976) |
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| Nuh II (976-997) | |
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| Mansur II (997-999) |
| Abd al-Malik II (999-1000) |
| Ismaïl (1000-1005) |
Les Hamdanides arabes, qui se rattachent au clan des Taghlibites, sont originaires de la Djézira en Haute Mésopotamie. Le groupe familial, avec Hamdan ibn al-Hârith, l'éponyme, avait d'abord manifesté sa présence dans le dernier quart du IXe siècle, en participant aux révoltes contre le califat ; la deuxième génération s'intègre au contraire dans la structure militaire abbasside et partagera les tentations des autres émirs pour la conquête du pouvoir à Bagdad. Husayn ibn Hamdan fut un valeureux général ; il prend une part active à la campagne victorieuse menée en 904, sous le califat d'al-Muktafi, contre les Tulunides, mais il refuse la proposition de gouverneur de l'Égypte qu'on lui offre. En 905-906, il reçoit le commandement de l'armée chargée de réprimer les Kalbites de Syrie et les Qarmates qui les soutiennent. Mais, en 908, il trempe dans une conspiration dont le but était de porter au califat al-Mutazz aux dépens du jeune al-Muktadir. Les partisans de ce dernier l'emportent et Husayn s'enfuit. Plus tard, il reviendra en grâce au près du calife, mais en 914-915, il entre en rébellion contre le vizir ; il est fait prisonnier en février 916 à Bagdad et exécuté deux années plus tard sur l'ordre du calife.
Les frères de Husayn étaient, quant à eux, restés fidèles au calife. Le plus illustre, Abû al-Haydja Abdallah fut nommé gouverneur de Mossoul en 905. Il joua, comme Husayn, un rôle militaire actif, en particulier dans les luttes contre les Qarmates et mourut en 929 à Bagdad, dans l'échec du coup d'État contre al-Muktadir. Véritable fondateur de la dynastie, il laissait deux fils qui furent les personnages les plus célèbres de la famille et gouvernèrent, l'un l'émirat de Mossoul, et l'autre celui d'ALep.
Ce fut avec la troisième génération, et la crise du califat, que se développa vraiment la puissance hamdanide. Hasan ibn Abd Allah travailla d'abord pour éliminer, de la région de Mossoul, les ambitions concurrentes de parents et voisins, et se fit finalement reconnaître en 935 par le calife al-Râdi, le gouvernorat des trois provinces qui constituaient le nord de la Mésopotamie.
S'étant lancé à son tour dans la compétition pour le contrôle du gouvernement de Bagdad, il occupa, en 942, pendant un an, le poste de Grand Émir ; il reçut alors le titre de Nâsir ad-Dawla (929-969); ce fut la première fois qu'un tel titre était attribué. Mais Nâsir ad-Dawla ne put s'y maintenir plus d'un an, faute de n'avoir pu empêcher l'installation des Buwayhides dans la capitale. Il dut se replier sur la Mésopotamie, où il constitua une domination familiale rivale autour des deux centres de Mossoul et d'Alep, qu'il avait conquis avec son frère Ali.
Mais à la suite de fréquents conflits avec les Buwayhides, Nâsir ad-Dawla est déposé et exilé. Il meurt deux ans plus tard en 969, l'année de la prise de l'Égypte par les Fatimides. Mais, en 977, son fils et successeur, Abû Taghlib (969-979), voulut intervenir dans le conflit qui opposait les émirs buwayhides, Bakhtiyâr et Adud ad-Dawla Fanâ Khusraw, en soutenant le Bouwayhide d'Iraq ; il fut vaincu, la Mésopotamie occupée et Abû Taghlib finit sa vie en fugitif, dans un obscur combat en Palestine, en 979. Ses frères durent se rallier au Buwayhide, qui les utilisa contre l'ambition montante des Kurdes ; l'émirat hamdanide de Mossoul n'existait plus. Les Buwayhides étaient devenus les maîtres de la ville.
Le fondateur de la branche hamdânide d'Alep fut Ali ibn Abd Allah, connu sous le nom de Sayf ad-Dawla (945-967). À partir de 946, l'installation des Buwayhides à Bagdad ôta définitivement aux Hamdanides la possibilité d'intervenir en Iraq, même si le Buwayhide d'Iraq jugea plus sage de ne pas essayer, dès cette époque, d'enlever leur territoire aux Hamdanides, qui acceptaient, par ailleurs, de continuer à s'acquitter, officiellement, auprès du gouvernement califal de versements financiers.
En fait, dès 944, la famille hamdanide avait été attirée en direction de la Syrie, vers Alep, où s'étendait alors l'autorité de l'Égypte, et, en 947, après deux ans de lutte, Ali Sayf ad-Dawla, installé à Alep, devenait le maître d'une principauté comprenant la Syrie du Nord et l'Ouest de la Mésopotamie, plus importante que celle de Mossoul. Ali Sayf ad-Dawla eut désormais le principal rôle d'assurer la défense du domaine musulman contre la volonté de reconquête byzantine ; en 962, Alep, sauf la citadelle, fut brièvement occupée par l'armée byzantine et le palais hamdanide détruit ; la Syrie et la Mésopotamie du Nord étaient une nouvelle fois envahies.
Après la mort de l'émir en 967, son jeune fils, Saad ad-Dawla, n'eut plus, pendant longtemps, qu'un pouvoir menacé. Il se maintint difficilement contre les Byzantins, contre ses parents, contre ses officiers, manœuvrant au mieux avec les Buwayhides, dont il reconnut la suzeraineté, et contre les Fatimides, nouveaux venus dans la région. Après sa mort en 991 et l'avènement de son fils, Saïd ad-Dawla (991-1002), l'émirat ne fut plus qu'un territoire disputé entre Fatimides et Byzantins, où, à partir de 1002, le pouvoir n'appartint même plus aux Hamdanides, mais à l'un de leurs émirs.
En fait, la grande époque des Hamdanides avait pris fin dès la mort des deux frères fondateurs ; ce sont eux, et surtout Sayf ad Dawla, héraut de l'Islam combattant, mais aussi mécène, attirant à sa cour des poètes comme al-Mutanabi ou Abû Firâs, et des hommes de culture.
Généalogie des Hamdanides |
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Yémen |
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Hamdan | |
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| Husayn (905-918) |
| Abu al-Haydja Abd Allah (905-929) | |
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Mossoul |
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Alep |
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| Nasir al-Dawla Abu Taghlib (929-969) | |
| Sayf al-Dawla Ali (945-967) | | |
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Uddat al-Dawla Abu Taghlib (969-979) | |
Saad al-Dawla Sharif (967-991) | | |
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Ibrahim al-Husayn (981-991) |
Said al-Dawla Said (991-1002) | |
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Ali II (1002-1004) |
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Au cours du IXe et Xe siècle, il surgit en Asie centrale et en Iran un ensemble de principautés indépendantes de droit ou de fait, ainsi que la constitution de troupes armées, surtout à partir de 928, dirigées par des chefs de guerre, issus des monts du Daylam au sud de la Caspienne, qui étendent par moments leur zone d'opérations jusque dans le nord de l'Iran et le Khûrasan samanides. Ces pouvoirs militaires daylamites dominent une large zone du pays, de l'Adharbaydjan (Azerbaïdjan) au Nord, jusqu'au Fars et au Kirman au Sud, entre la Mésopotamie arabe des Hamdanides et l'Orient des Samanides. C'est ainsi qu'à partir de 935, le Daylamite Ali ibn Buwayh et ses frères, se lancent dans la compétition ouverte à Bagdad entre les chefs militaires, pour la conquête du pouvoir. En effet, depuis al-Râdi, les califes abbassides, privés de vizirs, ne sont plus que les symboles sans pouvoir et sans rôle établi sur l'État sunnite. Partis des monts de la Caspienne, les Buwayhides ont suivi les zones montagneuses vers le Sud et sont parvenus à Shiraz, dans le Fars, dès 934, et au Kirman dès 936.
Ali ibn Bouwayh (934-949), est un officier daylamite formé chez les Samanides. En 931, il obtient le gouvernement de la région de Karadj, dans les monts du Djibâl, entre Hamadan et Ispahan. Très vite, il se constitua un important corps de mercenaires daylamites et s'empare d'Ispahan puis, quittant cette ville, il continue vers le Sud jusqu'à Shiraz où il obtint d'être confirmé en qualité de gouverneur en 934 par le calife. La ville devait rester le centre de pouvoir des Buwayhides.
Buwayh était père de trois garçons : Ali, al-Hasan et Ahmad, qui, en 913, fondèrent cette dynastie. En 935, tandis qu'il envoyait son frère cadet, Hasan, contre Ispahan et les Ziyarides, le plus jeune des Banû Buwayh, Ahmad, se dirigea vers le Kirman en 936, puis vers l'Ahwaz ; Ahmad s'empare de la province ce qui lui permet de s'imposer comme Grand émir à Bagdad en 945, avec le titre honorifique de Muizz ad-Dawla, tandis que le chef de famille Ali, à Shiraz, recevait celui de Imad ad-Dawla et Hasan devenait Rukn ad-Dawla. Cela ne change rien des rapports de pouvoir à l'intérieur de la famille buwayhide. Imad ad-Dawla Ali, l'aîné des trois frères, et de beaucoup le plus âgé, resta l'émir dominant. Il demeura à Shiraz et ne vint jamais à Bagdad. C'est d'ailleurs dans les capitales buwayhides, Ispahan ou Shiraz, que les émirs dominants de la famille, prennent les décisions politiques, et non à Bagdad. Ils contrôlent également l'activité de leurs compatriotes daylamites : Sallarides d'Adharbaydjan ou, au sud de la Caspienne, les Ziyarides. Les Buwayhides souhaitaient contrôler le califat. En 945, Ahmad entrait à Bagdad, où l'accueillit le calife al-Muktafi, et inaugura un régime qui devait durer jusqu'en 1055. Ce fut l'époque de la domination chiite sur le califat abbasside de Bagdad, mais ils se comportèrent néanmoins comme s'ils reconnaissaient au califat une véritable légitimité, ne fut-ce qu'en recevant de lui leur investiture.
Lorsque mourut le chef de famille, Imad ad-Dawla, en 949, sans héritier mâle, il avait désigné le fils de son frère Rukn ad-Dawla, le jeune Fâna Khûsraw âgé de treize ans, pour lui succéder à Shiraz, sous le nom de Adud ad-Dawla. L'autorité au sein de la famille revint alors à Rukn ad-Dawla Hasan, qui contrôlait Ispahan depuis près de dix ans déjà, après avoir chassé de Rayy le Ziyaride.
La situation en Iraq était préoccupante. À Bagdad, Muizz ad-Dawla, le Grand émir, avait, sa vie durant, contenu l'énergie des Hamdanides au Nord et, même, fait entrer une partie de la côte d'Arabie, l'Oman, dans le domaine bouwayhide ; mais les Hamdanides avaient aussi été le rempart de l'Iraq contre les Byzantins.
En 967, disparaissaient en même temps, de la scène politique, les deux principaux Hamdanides au Nord et Muizz ad-Dawla à Bagdad ; la pression byzantine s'était accentuée, bientôt doublée par celle des Fatimides, nouveaux venus en Égypte, qui progressaient vers la Syrie du Nord pour défendre l'Islam menacé. À Bagdad, à Muizz ad-Dawla avait succédé comme Grand émir son fils, Bakhthiyâr, et celui-ci, non seulement se désintéressait des événements du Nord, mais encore laissait se développer au sein de son armée un affrontement entre Daylamites et Turcs. Adud ad-Dawla Fâna Khûsraw fut alors envoyé de Shiraz par son père en 975, pour sauver son cousin ; il le força en fait à abdiquer ; mais Rukn ad-Dawla s'opposa à cette destitution et Adud ad-Dawla dut se soumettre.
L'année suivante en 976, le vieux prince reconnut cependant à Adud le droit de jouer le rôle de chef de famille après lui, à partir de Shiraz, deux de ses frères étant placés par ailleurs à Rayy et Ispahan : Fakhr ad-Dawla Ali et Muâyyid ad-Dawla Buwayh. Adud ad Dawla devint ainsi l'émir dominant. Il est considéré comme le plus grand des émirs buwayhides. De Shiraz, il avait déjà étendu son pouvoir sur le Kirman, et s'était imposé au Sijistan ; sur la côte d'Arabie, l'Oman lui avait été cédé. Dès la mort de son père, il se porta sur Bagdad, dont Bakhthiyâr fut chassé ; Bakhthiyâr périt par la suite au cours de la lutte qu'il tenta de poursuivre avec l'aide des Hamdanides et ceux-ci, pour l'avoir soutenu, furent soumis à l'autorité buwayhide. Il en alla de même pour le Ziyaride, Kâbûs, qui perdit le Tabaristan et le Jurjan. Un autre frère de Adud ad-Dawla, Muâyyid à Ispahan, fut un ferme soutien du prince.
En quelques années, un immense territoire fut soumis à une autorité unique. En s'installant à Bagdad, en 978, où il se fit construire un palais, Adud ad-Dawla voulait promouvoir une sorte de partage de l'autorité avec le califat, qui était au plus bas de son histoire. Le calife al-Taï dut même épouser la fille de Adud ad-Dawla ; mais la mort mit rapidement un terme aux projets du prince, en 983. Il avait été un mécène, grand protecteur de la culture arabe et reçu le grand poète al-Muntanabbi à Shiraz.
L'année 983 vit mourir à la fois Adud ad-Dawla et son frère Muâyyid ad-Dawla à Ispahan et relancer les querelles hégémoniques entre les princes buwayhides. Fakhr ad-Dawla Ali (983-997) fit son entrée à Ispahan et fut reconnu un temps comme émir dominant, alors que les deux premiers fils de Adud ad-Dawla se disputaient le poste de Grand émir à Bagdad ; puis à partir de 989, commença à s'imposer après la disparition de l'un d'entre eux, un troisième fils de Adud ad-Dawla, Bahâ ad-Dawla Fîruz (988-1012), à Shiraz. Mais la puissance des Bouwayhides ne s'était pas maintenue au niveau atteint sous Adud ad-Dawla ; ils n'arrivaient pas à profiter de la décomposition samanide en Iran.
En 997, Fakhr ad-Dawla mourut à Rayy et le pouvoir y fut désormais assuré au nom de son fils par sa veuve, la "Sayyida" ("la Dame"), une princesse kurde qui exerça en fait pendant trente ans un pouvoir sans réplique, tandis qu'Ispahan était confiée à partir de 1007 à un de ses parents Alâ ad-Dawla Muhammad "ibn Kâkûya" ("Le cousin de la Dame"), le premier et le plus grand des princes dits "Kâkûyides d'Ispahan, qui accueillit à sa cour le grand Ibn Sina, célèbre médecin et penseur, qui y vécut quatorze années de sa vie avant de mourir en 1037.
Cette évolution politique au Nord concourait à faire reconnaître la prééminence de Bahâ ad-Dawla qui, à partir de 998, resta le seul grand prince au Sud : la mort l'ayant débarrassé de son autre frère et il put s'installer à Shiraz, dans le centre familial.
La mort de Bahâ ad-Dawla Firûz, en 1012, provoqua une reprise des conflits pour l'hégémonie au sein de la famille. Bahâ avait désigné son fils, Abû shudja Sultân ad-Dawla (1012-1024), comme émir dominant, et celui-ci alla aussitôt s'installer à Shiraz, capitale dynastique ; un de ses frères, à qui avait été confié le Kirman, essaya au bout de quelques années, mais en vain, de lui ravir son autorité, avec l'aide des Ghaznévides ; puis ce fut un frère plus jeune qui se fit désigner par la troupe turque à Bagdad. En 1023, les trois frères se reconnurent mutuellement le titre de Shâhinshâh et il n'eut plus d'émir dominant. Ce fragile équilibre se trouva de nouveau rompu peu après, en 1024 et 1025, avec la disparition des princes de Shiraz et de Bagdad. Le fils de Sultân ad-Dawla, Imad ad-Dawla Abû Kâlidjâr (1024-1048), qui succéda à son père à Shiraz, et un autre frère de Sultân ad-Dawla, qui était installé à Bagdad, se comportèrent à nouveau en princes rivaux et tout à fait indépendants l'un de l'autre ; jusqu'à ce que la mort de son oncle, en 1044, fasse d'Abû Kâlidjâr le dernier émir dominant des Buwayhides, mais ce fut pour peu de temps ; il disparut quatre ans plus tard, empoisonné par un de ses gouverneurs du Kirman, qui avait décidé de se rallier aux Seldjoukides.
À la mort d'Abû Kâlîdjâr, la guerre éclata aussitôt entre ses deux fils : l'un, al-Malik al-Rahim Khusraw Firûz (1048-1055), Grand émir à Bagdad, et l'autre seigneur de Shiraz. Les Buwayhides, à nouveau plongés dans les luttes fratricides, font appel aux Seldjoukides. Le passage de Tughrîl Beg par Bagdad, en 1055, mit fin à l'émirat du représentant de la dernière génération buwayhide en Iraq, al-Malik al-Rahim Khusraw Firûz ; les autres princes de la famille survivent quelque temps en vassaux ou simples dignitaires de la nouvelle cour du sultanat seldjoukide sunnite.
Les Ghûrides, ou Shansabânis, d'origine iranienne, furent la dernière des puissances régionales que l'on puisse rattacher aux émirats précédents. Ils étaient initialement une des familles dominantes de la région du Ghûr, située à l'Est de Hérat dans les régions montagneuses et difficilement accessibles, au cœur de l'Afghanistan actuel. L'émir ghaznévide Mahmûd avait mené des expéditions dans le Ghûr et s'était assuré la dépendance des Shansabânis ; par ailleurs, les Ghaznévides leur interdisaient, par leur simple présence, une libre expansion vers l'Est. Ils subirent de même l'autorité des Seldjoukides, dont la puissance dans la région était en plein développement ; une expédition contre le Ghûr eut même lieu en 1108 et l'un des chefs des Shansabânis fut fait prisonnier.
La ville de Firûzkûh, qui devait être la capitale de l'émirat, fut fondée peu avant le milieu du XIIe siècle ; c'était une cité royale en pleine montagne, une imprenable citadelle. En 1148, les Shansabânis, les vassaux des Ghaznévides, occupèrent Ghazni. Bahrân Shah, ayant repris sa capitale, fit exécuter celui des chefs ghûrides qui y était resté ; le frère de celui-ci, Ala ad-Din Hussayn, se porta sur Ghazni, qu'il atteignit en 1150, et, pendant une semaine, livra la capitale au massacre, au pillage, à la destruction et à l'incendie. Il voulut, deux ans après, s'en prendre à l'hégémonie des Seldjoukides, mais ce fut un échec qui le conduisit un moment dans les prisons seldjoukides. Toutefois, à cette époque, aussi bien les Seldjoukides que les Ghaznévides étaient à leur déclin. Aussi, après une crise qui remit en question la place des Shansabânis parmi les familles dominantes du Ghûr, deux frères, portant tous deux le nom de Muhammad, assumèrent la direction de la famille. Les deux princes s'aidaient l'un l'autre, et la puissance ghûride se développa.
Le premier, Ghiyâth ad-Dîn Muhammad, à partir de 1163, eut le rôle d'émir dominant ; il avait pour capitale Firûzkûh. Il mena surtout campagne vers l'Iran où il s'empara de Hérat, puis du khûrasan tout entier en 1200, se posant en défenseur du sunnisme dans ses territoires et s'assura le soutien du calife al-Nâsir, qui lui-même cherchait à affirmer son indépendance vis-à-vis des Seldjoukides. Le Khûrasan fut occupé, peu avant la mort de Ghyâth ad-Dîn Muhammad en 1203.
Son frère, Muizz ad-Dîn Muhammad, qui avait de son côté mis fin à la puissance ghaznévide, résidait lui à Ghazni, pour mieux surveiller ses territoires de l'Inde du Nord où il guerroyait, mettant fin, avec la prise de Lahore en 1185, à la dynastie ghaznévide, qui disparut définitivement en 1190. Mais il ne put maintenir cette trop vaste domination et disparut à son tour, assassiné, en 1205.
La puissance ghûride fut ruinée dans les dix années qui suivirent, sous les attaques des Khwarezm-Shahs, peu avant l'invasion mongole qui devait tout balayer sur son passage.
Les Ghûrides étaient, comme les Ghaznévides, des princes mécènes, protecteurs des poètes persans. Ils furent des constructeurs de monuments religieux et de caravansérails.
Les Ghûrides |
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Izz al-Dîn Husayn : | 1100-1146 | ||
Sayf al-Dîn Suri ibn Husayn : | 1146-1149 | ||
Baha al-Dîn Sam Ier : | 1149 | ||
Ala al-Dîn Husayn Jahan Soz : | 1149-1161 | ||
Sayf al-Dîn Muhammad : | 1161-1163 | ||
Ghiyath ad-Dîn Muhammad ibn Sam : | 1163-1203 | ||
Muizz ad-Dîn Muhammad ibn Sam : | 1203-1206 | ||
Ghiyath ad-Dîn Mahmud : | 1206-1212 | ||
Baha ad-Dîn Sam II : | 1212-1213 | ||
Ala ad-Dîn Atziz : | 1213-1214 | ||
Ala ad-Dîn (ou Diya ad-Dîn) Muhammad : | 1214-1215 | ||
Les Zengides sont les membres d'une dynastie turque qui a régné sur l'Orient musulman, pendant presque un siècle, de 1127 à 1222, et qui va jouer un rôle capital en Mésopotamie et en Syrie pour la renaissance de l'Islam et qui fera déplacer le centre de gravité de l'Islam vers la Syrie.
Le plus ancien membre connu de la famille est Ak Sungur al-hadjib, un officier turc au service du sultan seldjoukide Malik Shah Ier. En 1085, Tutush, émir de Damas et frère de Malik Shah défait et tue son cousin Sulayman Ier Shah, sultan de Rum, lors d'une bataille à proximité d'Alep, s'empare d'Édesse et d'Antioche et se proclame sultan de Syrie. Cependant, Malik Shah se méfie de son frère, intervient en Syrie et impose trois de ses fidèles comme gouverneurs des trois villes. Ak Sungur est ainsi nommé gouverneur d'Alep.
En 1092, Malik Shah meurt, ses fils se déchirent pour la succession, Bakyaruk prend l'avantage et Tutush envisage de s'emparer de l'Iraq et d'éliminer son neveu. Il oblige Ak Sungur à l'accompagner, mais ce dernier refuse par fidélité pour le fils de son ancien maître. En 1094, Tutush assiège Alep pour se venger, capture Ak Sungur et le fait décapiter.
En 1102, son fils Imad ad-Dîn Zengi (1127-1147), se met au service du grand sultan seldjoukide. Devenu gouverneur de Bassora, Zengi réprime la révolte du calife abbasside al-Mustarchid près de Bagdad en 1126. En 1127, il est nommé atabeg de Alp Arslan, fils du sultan Mahmûd, et succède à son père comme gouverneur de Mossoul et d'Alep. Cette date est le point de départ de la réaction sunnite contre les Francs ; elle va aussi marquer le début des succès musulmans sur les Croisés, qui ravagent sans cesse le territoire d'Alep ainsi que les régions de Hama et Hims.
Après avoir pris le contrôle des deux villes, il obtient du sultan seldjoukide la reconnaissance de l'autorité sur la Syrie musulmane. Fort de cette légitimité, il passe les dix huit années qui suivent à unifier la Syrie et à déclencher une offensive organisée contre les Croisés afin de reconquérir les territoires conquis par ces derniers. Mais il doit intervenir également en Iraq pour aider son maître à combattre le calife qui cherche à reprendre son pouvoir.
Homme énergique, loyal sujet du sultan, Zengi organise la reconquête des territoires de Dar al-Islam. En 1130, il se rend de Mossoul à Alep pour reprendre la Guerre Sainte contre les Francs. Il va essayer de faire diminuer la pression franque sur le territoire d'Alep. Il fait un raid pour reprendre Atârib qui sert de base aux incursions franques et qui finit par tomber. Les musulmans vont plus avant et parviennent jusqu'à Hârim. Ainsi, en une seule campagne, Zengi, non seulement, réussit à récupérer les territoires qui payaient tribut aux Francs, mais encore obtient des Francs de Hârim le versement d'un tribut identique à celui que les Alépins leur avaient antérieurement versé. Rapidement, la situation d'Alep s'améliore et Zengi peut s'absenter sans crainte.
En 1132, Zengi participe aux querelles des Seldjoukides qui ont suivi la mort du sultan Mahmûd ibn Muhammad ; il prend une attitude anti-califienne et appuie Masûd ibn Muhammad, frère du sultan défunt. Après avoir essayé d'attaquer Bagdad, Zengi est poursuivi par ses adversaires, il manque d'être capturé à la suite d'une défaite, mais il est secouru par Najm ad-Dîn Ayyub, gouverneur de Tikrît et père de Saladin, qui l'aide à franchir le fleuve et, trahissant son maître le Seldjoukide Bihrûz, donne l'hospitalité à Zengi. Ce service fut à l'origine des bonnes relations qu'entretinrent les deux familles jusqu'à l'avènement de Saladin.
De 1140 à 1143, se déroulent les opérations par Zengi contre les Turcomans, les Artuqides de Diyâr Bakir et les Kurdes.
Son plus grand succès est la prise d'Édesse le 23 décembre 1144, aux croisés. Édesse, peuplée de chrétiens, en majorité arméniens, hostiles aux Byzantins, était la ville franque la plus importante à l'Est de l'Euphrate, et ses nombreuses garnisons faisaient de fréquentes incursions en territoire musulman. C'était également un important nœud routier. Désormais, la principauté d'Antioche est le seul État franc dans le Nord : elle sera l'objet principal d'Alep et de Mossoul.
En juin 1146, pour assurer les communications entre Alep et Mossoul, Zengi assiège la citadelle de Djâbar, située sur la rive gauche de l'Euphrate, en face de Siffin et tenue par un émir révolté chiite, quand il est assassiné par un de ses serviteurs.
Le rôle de Zengi aura été déterminant pour l'Islam. Ayant accédé au pouvoir au moment où les Francs harcèlent Dâr al-Islam, Zengi tente de redonner un sens au djihad ; il parvient à contenir la poussée franque et à regrouper un certain nombre de princes musulmans, mais ce sera le destin de son fils Nûr al-Dîn Mahmûd, de faire pencher la balance en faveur de l'Islam, à qui Saladin rendra Jérusalem.
La mort de Zengi entraîne la dispersion de son armée et l'éclatement de son empire. Il y avait quatre héritiers. Le fils aîné, Sayf ad-Dîn Ghâzi Ier, lui succède à Mossoul. Le second fils, Nûr ad-Dîn Mahmûd, a vingt-neuf ans ; il a accompagné son père dans la plupart des opérations militaires et jouit d'un prestige certain dans l'armée, il lui succède à Alep. Le troisième, Nusrat ad-Dîn Amir, qui se révoltera plus tard contre Nûr ad-Dîn, sera gouverneur de Harran. Le quatrième, Qutb ad-Dîn Mawdûd, n'a que seize ans ; il succédera à son frère aîné à Mossoul.
Les Francs espéraient que les querelles d'héritage allaient affaiblir la puissance zengide. Raymond de Poitiers, prince d'Antioche, lance alors deux unités combattre l'une contre Alep, l'autre contre Hama. Le général Shirkûh contre attaque avec ses escadrons, il oblige les Francs à se retirer sur Antioche.
Quant à Édesse, qui avait été pendant près d'un demi-siècle (1098-1144) le bastion oriental de l'expansion franque, était passé sous contrôle musulman avec Zengi. À l'appel de ses habitants arméniens, Les Francs, avec Joslin, pénètrent dans la ville. Nûr ad-Dîn, venant d'Alep, à marches forcées, organisa un siège en règle. Finalement, les Arméniens décidèrent d'évacuer la ville. Il y eut de nombreux prisonniers, tandis que Joslin réussit à fuir en franchissant l'Euphrate. Édesse, ville chrétienne, qui relevait de Mossoul à la mort de Zengi, est intégrée dans le territoire d'Alep, dont Nûr ad-Dîn est le maître.
En juin 1149, Nûr ad-Dîn décide d'attaquer la région d'Apamée, occupée par les Francs. Un sanglant combat se déroule au lieu-dit "Ard al-Hâtim", le Fons Muratus des occidentaux, Nûr ad-Dîn occupe rapidement le pays, puis vient mettre le siège sous les murs d'Antioche ; pendant le siège, il prend Hârim, où il installe une garnison, puis il s'empare d'Apamée. Il revient ensuite sous les murs d'Antioche. Les adversaires finissent par signer une trêve.
Puis Nûr ad-Dîn, afin de poursuivre la lutte contre les Croisés, doit organiser l'unité de la Syrie. Il décide alors de reprendre le projet de son père de s'emparer de Damas, alors tenue par les Burides, et d'intégrer la ville dans un ensemble syrien. En avril 1150, il vient camper au sud de Damas et engage des négociations. Il est reconnu comme suzerain nominal et est nommé dans la khutba après le calife et le sultan. Il décide donc d'attendre une meilleure occasion et retourne à Alep.
En 1154, Nûr ad-Dîn, quand la situation parue propice et grâce aux actions de ses lieutenants Shirkûh et son frère Nadj ad-Dîn Ayyub, père de Saladin, s'empare de Damas, avec la complicité de certains éléments de la population. Shirkûh est nommé commandant militaire de Damas.
En huit ans, patiemment Nûr ad-Dîn est arrivé à réaliser le rêve de son père et à constituer l'unité syrienne. Désormais les deux grandes cités, Alep et Damas, se trouvent au pouvoir d'un même souverain sous l'égide de l'Islam sunnite.
Pendant ce temps, le califat égyptien fatimide est déchiré par les luttes de pouvoir qui opposent les vizirs successifs. Shâwar, l'un d'entre eux, est chassé du pouvoir en 1163, mais parvient à quitter l'Égypte, se réfugie à la cour de Nûr ad-Dîn et le persuade d'organiser une expédition pour le remettre au pouvoir ; expédition dont la direction est confiée à Shirkûh. Après six ans de guerre, contre les Égyptiens et les Francs, qui étaient également intervenus, Shirkûh devient le maître de l'Égypte, mais il meurt le 23 mars 1169, laissant le pouvoir à son neveu Saladin.
Pendant que se déroulaient les opérations en Égypte, Nûr ad-Dîn a attaqué, avec des renforts venus de Mossoul, le comté de Tripoli et s'était emparé de plusieurs places-fortes tenues par les Francs. Peu après il réussit aussi à s'emparer de Qalât Djâbar, où son père avait trouvé la mort. Après ce succès, Nûr ad-Dîn contrôlait toutes les voies de communication qui reliaient la Syrie à la Djéziré.
En Égypte, désigné comme successeur par son oncle, Saladin montre rapidement des velléités d'indépendance. Jusqu'à l'année 1172, les relations entre Nûr ad-Dîn et Saladin restèrent celles d'un chef avec son subordonné. Mais par la suite, Saladin, qui ne voulait pas que l'Égypte devienne une colonie zengide, se considérait comme le maître au Caire et voulait se rendre indépendant. Au printemps 1174, Nûr ad-Dîn prépare une expédition pour le soumettre, quand il tombe malade et meurt, le 15 mai 1174.
Les vingt-huit années de règne de Nûr ad-Dîn ont marqué une phase décisive dans l'évolution de la conscience du djihâd en Syrie et le redressement de l'orthodoxie musulmane.
Nur ad-Dîn laisse un fils âgé de onze ans al-Malik as-Salih Ismaïl, et trois lieutenants, gouvernant respectivement Damas, Alep et Mossoul. Saladin dans un premier temps reconnaît la suzeraineté d'Ismaïl, dont le nom est cité dans la khutba au Caire. En effet, le maître d'Égypte avait manifesté le désir d'aider le nouveau souverain de Damas. À la fin de l'été, la situation est critique en Syrie. Le fils de Nûr ad-Dîn a été emmené à Alep par son atabeg Kumushakin, dont la politique gêne les Damascains. Ceux-ci font alors appel à Saladin qui y répond favorablement. En octobre 1174, il est à Damas, où il reçoit un accueil populaire enthousiaste. Il précise néanmoins qu'il n'est venu à Damas que pour protéger les intérêts d'al-Malik as-Salih, dont il reconnaît solennellement la suzeraineté ; il n'est quant à lui que le protecteur de la dynastie. Son but est de ressouder l'unité de la Syrie. il est surtout préoccupé par Alep, où se trouve son légitime souverain. Celui-ci est entre les mains d'un groupe d'anciens émirs de Nûr ad-Dîn. La Syrie est séparée en deux parties hostiles : Zengides et Ayyoubides vont s'affronter pour y avoir la suprématie. Saladin donne des instructions pour organiser une opération contre Alep.
En novembre 1174, Saladin nomme comme gouverneur à Damas son frère Tughtakîn et se dirige vers la Syrie du Nord pour récupérer les villes qui étaient devenues pratiquement indépendantes. La progression sera lente et le 30 décembre, il campe près d'Alep où il commence un siège et dont il ne prendra possession qu'en mai 1175, après de durs combats et de difficiles négociations. Plus tard, il reçoit l'investiture par al-Mustadi, calife de Bagdad, reconnaissant ainsi son autorité sur l'Égypte, la Syrie et d'autres provinces ayant appartenu à Nûr ad-Dîn. Le nom du fils d'Ayyûb est cité dans la khutba en Syrie comme en Égypte, et les pièces de monnaies sont frappées à son nom, al-Malik an-Nâsir Yûsuf ibn Ayyûb.
En décembre 1181, al-Malik as-Salih meurt ; il avait demandé qu'Alep soit donnée à Izz ad-Dîn de Mossoul, le seul Zengide capable de résister à Saladin. Le 29 décembre, Izz ad-Dîn prit possession d'Alep, qui sera cédée à son frère, Imâd ad-Dîn Zengi II, en échange de Sinjar. Ce dernier y fera son entrée le 20 mai 1182. Quelques jours plus tôt, Saladin inquiet de ces transactions familiales zengides, quitta Le Caire pour se rendre en Syrie.
Le 21 mai 1183, il met le siège devant Alep. Le seigneur d'Alep Imâd ad-Dîn Zengi II, après des négociations secrètes avec Saladin, en échange d'Alep reçoit Sinjar. Le 11 juin 1183, après huit années d'efforts, les bannières de Saladin flottent sur la citadelle d'Alep. Onze jours plus tard, après la prise de Hârim, la Syrie tout entière est aux mains du souverain ayyoubide, mettant fin au gouvernorat zengide de Syrie.
À l'annonce de la mort de Zengi, son pupille seldjoukide, le jeune Alp Arslan, fils du sultan Mahmûd, songe à se faire reconnaître comme souverain. Pour les conseillers de Zengi, pour garder leurs postes, il leur fallait soutenir les fils de leur ancien maître. C'est alors que, par d'habiles manœuvres, ils éloignent le jeune Seldjoukide vers Raqqa. Et pendant qu'Alp Arslan mène joyeuse vie dans sa nouvelle résidence, on fit venir d'urgence à Mossoul Sayf ad-Dîn Ghâzi et faire reconnaître sa suzeraineté officielle sur Mossoul, par le sultan. Sayf ad-Dîn restait dorénavant maître à Mossoul et, en qualité de chef de famille, sauvegardait l'héritage paternel face aux ambitions des Artuqides.
Mais le règne de Sayf ad-Dîn fut de courte durée, et en septembre 1149, alors qu'il venait de reprendre aux Artuqides de Mârdin quelques-unes des places que Timûr Tash lui avait prises, il tombe malade et meurt deux mois plus tard. Nûr ad-Dîn qui avait accourut à son chevet, règle les problèmes de succession en Djéziré en faisant reconnaître comme maître de Mossoul son frère cadet Qutb ad-Dîn Mawdûd.
En septembre 1170, Nûr ad-Dîn eut à régler, pour la seconde fois de sa vie, la succession de Mossoul : Qutb ad-Dîn Mawdûd venait de disparaître après vingt et un ans de règne. La succession étant difficile, Nûr ad-Dîn se rendit lui-même à Mossoul pour régler l'affaire avec ses neveux. La Djéziré, grâce à l'appui du calife, reste hors de l'autorité du sultan seldjoukide. Et c'est Sayf ad-Dîn Ghâzi II qui est nommé.
En 1174, le prince de Mossoul, Sayf ad-Dîn Ghazi II, neveu de Nûr ad-Dîn, apprit la mort de son oncle, alors qu'il se rendait en Syrie avec des contingents de renfort pour l'expédition que Nûr ad-Dîn préparait contre l'Égypte. Il en profita pour annexer un certain nombre de places et reçut l'hommage des gouverneurs d'Édesse, de Harrân et de Raqqa notamment ; il ramena ainsi sur l'Euphrate la frontière de la Djéziré.
Après avoir achevé sa prise de contrôle de Mossoul, Sayf ad-Dîn Ghâzi II, tente de chasser Saladin de Syrie à deux reprises, mais il est battu par ce dernier, en avril 1176. Même si Mossoul et Alep résistent aux sièges de Saladin, les princes zengides doivent accepter le protectorat de Saladin.
Le 28 juin 1180, Sayf ad-Dîn Ghâzi meurt : son frère, Izz ad-Dîn Masûd, lui succède à Mossoul. Saladin tente une nouvelle offensive contre les zengides, assiège en vain Mossoul, mais persuade Imad ad-Dîn Zengi de lui céder Alep en échange de Sinjar en 1183.
Désormais sous protectorat ayyoubide, les zengides ne tentent plus de révolte contre Saladin. En 1190, Saladin, qui a conquis la plus grande partie des états croisés, voit l'une de ses villes, Saint-Jean-d'Acre, assiégée par la troisième croisade. Il appelle tous les musulmans au djihad et plusieurs zengides figurent parmi ceux qui répondent, mais les efforts des musulmans ne parviennent pas à empêcher les croisés de prendre la ville.
Après la mort de Saladin, Izz ad-Dîn Masûd tente de se libérer de la tutelle ayyoubide, mais sa mort met fin à sa tentative. Dans les années qui suivent les Zengides disparaissent progressivement de la scène politique syrienne et irakienne, jusqu'à la mort du dernier d'entre eux, Nâsir ad-Dîn Mahmûd, en 1222.
Généalogie des Zengides |
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Zengides d'Alep et de Damas |
Zengides de Mossoul |
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Imâd ad-Dîn Zengi ibn Ak Sungur (1127-1146) |
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| Nûr ad-Din Mahmûd ibn Zengi (1146-1174) | |
| Sayf ad-Dîn Ghâzi Ier (1146-1149) |
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al-Malik as-Salih Ismaïl (1174-1181) |
Qutb ad-Dîn Mawdûd (1149-1169) |
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Sayf ad-Dîn Ghâzi II (1169-1176) |
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Izz ad-Dîn Masûd Ier (1176-1193) |
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Nûr ad-Dîn Arslan Shâh Ier (1193-1211) |
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Izz ad-Dîn Masûd II 1211-1218) |
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Nûr ad-Dîn Arslan II (1218-1219) |
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Nâsir ad-Dîn Mahmûd (1219-1222) |
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Shadi ibn Marwan, un chef kurde, père d'Ayyub et de Shirkûh, est à l'origine de la famille qui appartenait au clan kurde de Rawadiya. Ils étaient parents de la dynastie kurde des Shaddadides. En 1130, Shadi emmena sa famille d'abord à Bagdad, puis à Tikrit où il est nommé gouverneur par le sultan seldjoukide. Shadi meurt peu après et Ayyub lui succède comme gouverneur de Tikrit.
En 1132, le calife al-Mustarchid profite de la mort du sultan Mahmoud II et de la lutte pour sa succession pour tenter de s'émanciper de la tutelle seldjoukide. Zengi, émir de Mossoul, marche sur Bagdad pour soutenir les Seldjoukides, mais il est battu près de Tikrit par l'armée du calife. Encerclé avec son armée au bord du fleuve, il ne doit son salut qu'à Ayyub qui lui fait traverser le fleuve et l'aide à s'enfuir.
Vers 1137, les deux frères quittent Tikrit pour rejoindre Zengi, qui nomme Ayyub gouverneur de Baalbek et Shirkûh officier dans son armée.
En 1154, à la suite de la conquête de Damas par Nûr ad-Din, fils de Zengi, Ayyub est nommé gouverneur de Damas.
De 1164 à 1169, Nûr ad-Din envoie Shirkûh et son neveu Salah ad Dîn (Saladin) pour intervenir en Égypte dans les querelles de pouvoir autour du vizirat. Il en sort vainqueur et devient gouverneur d'Égypte, mais il meurt quelques mois après, en mars 1169. Le calife fatimide al-Adid nomme alors Salah ad-Dîn au vizirat.
En quelques semaines, Saladin prend les choses en main avec énergie, élimine les fonctionnaires fatimides qui lui semblent indignes de confiance et les remplace par ses hommes, écrase une révolte de l'armée égyptienne et repousse en octobre 1169 une invasion franque. Le vizir était devenu le vrai maître de la vallée du Nil, même s'il la gouvernait au nom de Nûr ad-Dîn. Il cherche, également, à s'affranchir de la tutelle de Nûr ad-Dîn, tout en affichant des propos de soumission.
En 1171, Nûr ad-Dîn, sunnite convaincu, exige l'abolition du califat fatimide chiite. Saladin hésite, car il tient son pouvoir du calife fatimide, et cette abolition le prive de sa légitimité, mais il finit par le faire le 10 septembre 1171.
Mais Nûr ad-Dîn s'inquiète de plus en plus, et persuadé qu'il n'a plus d'homme de confiance en Égypte, il prépare une expédition pour soumettre Saladin, quand il meurt, le 15 mai 1174. Ceci dégagea Saladin de toute obédience et lui permit de briguer la succession du prince d'Alep défunt.
Durant les années qui suivent la priorité de Saladin, reprenant à son compte la politique de Zengi et de son fils, est d'unifier les musulmans, pour ensuite attaquer les États croisés. Aussi se rend-il avec son armée en Syrie en se présentant comme le protecteur des fils de Nûr ad-Dîn al-Malik as-Salih, un prince de onze ans. Damas, qui se souvient du gouvernorat de son père, Ayyub, se soumet à Saladin, tandis qu'Alep et Mossoul se retranchent et lui refusent l'entrée de la ville, qui assiège Alep. Peu après, Sayf ad-Dîn Ghazi II, atabeg zengide de Mossoul, tente de reprendre Damas à Saladin, mais il échoue.
Deux ans plus tard, Sayf ad-Din Ghazi II tente encore d'éliminer Saladin, mais il est battu et Saladin impose son protectorat aux princes zengides d'Alep et de Mossoul.
Ayant écarté la menace zengide, à défaut d'avoir soumis la Syrie musulmane, Saladin commence à s'intéresser aux États croisés. En 1177, il envahit le royaume de Jérusalem. En 1179, il bat les Francs à Panéas, à Marj al-Ayoun et au Gué de Jacob.
En mai 1183, il assiège Alep, que l'émir Imad ad-Dîn lui livre en échange de Sinjar.
La Syrie et l'Égypte maintenant unifiées sous son autorité, Saladin peut envisager de concentrer ses efforts sur les États francs. Le 29 septembre 1183, il pénètre dans le royaume de Jérusalem et se dirige vers Bethsan, qu'il pille. En 1187, il envahit le royaume de Jérusalem, rencontre l'armée franque à Hattin, l'anéantit le 4 juillet 1187 et prend, une par une, toutes les places-fortes du royaume de Jérusalem, à l'exception de Tyr.
À la nouvelle de la chute de Jérusalem, l'Europe envoie une troisième croisade commandée par les rois Philippe Auguste et Richard Coeur de Lion. Cette croisade réussit à reprendre les villes du littoral, comme Saint-Jean-d'Acre, Arsouf et Jaffa, mais ne parvient à reprendre Jérusalem. Saladin meurt peu après, dans la nuit du 3 au 4 mars 1193. Il était devenu un héros en Orient et aussi en Occident chrétien.
Les fils de Saladin se partagent ses possessions : l'aîné, al-Afdal Nûr ad-Dîn Ali, reçoit Damas, la Syrie méridionale et la Palestine, al-Malik al-Zahir Ghazi prend Alep et la Syrie du Nord et al-Aziz Imad ad-Dîn Uthman l'Égypte. Al-Adil, le frère de Saladin, reçoit la Transjordanie et la Djéziré et son fils, al-Muazzam Isâ est maître de Kérak. Des membres de la famille de moindre importance héritent de fiefs mineurs. Les princes zengides de Sinjar et de Mossoul, ainsi que l'émir de Mardin profitent de la mort de Saladin pour secouer la tutelle ayyoubide, mais leur tentative tourne court.
À peine intronisés, les fils de Saladin se font la guerre. En mai 1194, al-Afdal, sultan de Damas et l'aîné de la fratrie, se trouve menacé par son frère al-Aziz, sultan d'Égypte, qui cherche à étendre son hégémonie sur les autres membres de la famille régnant en Syrie et en Mésopotamie. Il appelle son oncle al-Adil à son secours. Al-Aziz est repoussé en 1195, mais al-Afdal se brouille avec son oncle qui s'établit en Égypte et aide son autre neveu al-Aziz à faire la conquête de Damas et à en chasser al-Afdal. Al-Aziz meurt d'une chute de cheval en novembre 1198, et son fils Malik al-Mansur, âgé de dix ans, lui succède sous la régence d'al-Afdal. En 1199, al-Adil réussit à lui reprendre Damas, puis à envahir l'Égypte qu'il contrôle le 5 février 1200. Ses neveux font une dernière tentative en 1201, mais sans succès.
Une fois maître de l'Empire ayyoubide, al-Adil considère que le jihad n'a plus de raison d'être, après la prise de Jérusalem, et pratique une politique de paix avec les Francs ; une trêve est même signée, en septembre 1204, pour une durée de dix ans, suivie d'une autre en novembre 1211. Mais en 1218, c'est une cinquième croisade qui débarque en Égypte et assiège Damiette. Accablé par la nouvelle, al-Adil meurt le 31 août 1218 à Damas.
Al-Adil avait organisé sa succession de son vivant en nommant ses fils al-Muazzam Isâ, al-Kamil Muhammad et al-Ashraf Mûsa respectivement gouverneurs de Damas, d'Égypte et de la Djéziré, de sorte que sa succession se passa sans trop de problèmes. Les trois frères font même front commun et finissent par repousser les croisés et reprendre Damiette. Les relations ne sont d'autre part pas rompues avec al-Malik al-Zahir, fils de Saladin, qui reste à Alep.
Mais cette entente entre les trois frères finit par se lézarder. En 1226, al-Ashraf, dont les domaines sont menacés par les Khwarismiens, se rend à Damas pour demander de l'aide à son frère al-Muazzam, mais celui-ci le garde dans une captivité dorée pour l'obliger à s'allier avec lui contre al-Kamil. À peine libéré, al-Ashraf se dépêche de revenir sur ses engagements et rejoint son frère al-Kamil. Al-Muazzam s'allie aux Khwarismiens, tandis que ses deux frères dépêchent une ambassade auprès de l'empereur Frédéric II, lui promettant Jérusalem contre son alliance et son aide militaire. Mais la guerre fratricide n'aura pas lieu, car al-Muazzam meurt, le 11 novembre 1227 et son fils, an-Nâsir Dawûd, est nommé pour lui succéder à Damas.
Frédéric II arrive quand même en Orient, à la tête de la sixième croisade et obtient la rétrocession de Jérusalem, tandis qu'al-Kamil et al-Ashraf assiègent leur neveu an-Nasir Dawûd, fils d'al-Muazzem, à Damas. Quand la ville est prise, en juin 1229, les deux frères se partagent le sultanat de Damas ; al-Kamil recevant la Palestine tandis qu'al-Ashraf devient le sultan de Damas.
En 1230, les Ayyoubides doivent faire face aux Khwarazmiens qui envahissent la région de AKhlât, à proximité du lac de Van et qui est possession d'al-Ashraf, et y font massacrer la population. Les princes voisins, dont les Ayyoubides et les Seldjoukides de Rum s'unissent en une coalition qui livre bataille près d'Erzinjan et leur inflige une défaite complète le 10 août 1230 ; et al-Ashrâf réoccupe Akhlât en ruines.
Trois ans plus tard, en 1233, les alliés de la veille se disputent les régions de AKhlât, d'Édesse et de Harran. Puis regroupés autour du sultan al-Kâmil, les Ayyoubides retrouvent leur solidarité familiale, sous son commandement, pour lutter contre Kay Qubâd Ier, sultan de Rum, dans une guerre indécise qui dure deux ans. Peu après al-Ashraf se brouille avec son frère al-Kamil et prépare une révolte contre lui, quand il meurt le 27 août 1237. Al-Salih Ismaïl succède à son frère al-Ashraf et tente de reprendre la révolte à son compte, mais il est battu par al-Kamil qui assiège Damas et l'occupe le 29 décembre 1237. Mais al-Kamil ne profite pas longtemps de son triomphe, car il meurt peu après, le 8 mars 1238. La disparition d'al-Kamil laisse les princes ayyoubides déchirés par les rivalités ; il n'y aura plus désormais de chef pour animer la solidarité familiale.
À al-Kamil, succède son fils, al-Adil II Sayf ad-Din, mais son avènement marque le début d'une période d'anarchie au sein de l'Empire ayyoubide. Shirkûh, émir de Homs, attaque son voisin et rival Taq ad-Din, émir de Hama. À Damas, les luttes de pouvoir éclatent et son demi-frère, Malik al-Salih Ayyoub, y prend le pouvoir au début de l'année 1239. Il en est chassé en septembre de la même année par un de ses oncles, al-Salih Ismaïl, et capturé par un de ses cousins, an-Nasir Dawûd, ancien sultan de Damas et émir de Kérak.
Pendant ce temps, al-Adil mécontente les Mamelouks en les écartant des postes clés et en y plaçant ses favoris. À Kérak, peu après, an-Nasir libère Ayyoub et les deux s'allient contre al-Adil et Ismaïl. Le 31 mai 1240, les Mamelouks cernent la tente d'al-Adil, se saisissent de sa personne, le déposent et appellent Ayyoub pour le mettre sur le trône. Il y régnera de 1240 à 1249.
Sachant qu'il tient son pouvoir des Mamelouks, Ayyoub les favorise et vit le plus souvent au sein de la caserne bahride. Il s'allie également aux Khwarazmiens qui reprennent Jérusalem aux Francs et la pillent, puis l'alliance des Égyptiens et des Khwarazmiens défait une coalition franco-damascène à La Forbie, au nord-est de Gaza, le 17 octobre 1244. Ayyoub profite de ce succès pour reprendre Damas à son oncle Ismaïl. En 1248, il combat en Syrie contre son cousin d'Alep, quand l'annonce de la septième croisade l'oblige à revenir en Égypte pour la défendre. Il meurt peu après et son fils, Tûrân Châh, qui lui succède, accumule les maladresses et se fait assassiner par les Mamelouks, sous la conduite de Baybars, qui prennent le pouvoir. La sultane Shadjar ad-Durr, veuve d'Ayyoub, et le sultan mamelouk Izz ad-Dîn Aybak montent alors sur le trône égyptien, même s'ils doivent nommer pendant quatre ans un sultan ayyoubide, al-Ashraf Mûsa III, pour faire face aux prétentions légitimes d'al-Nasir Yûsuf, prince d'Alep.
Les dirigeants de Damas refusent le nouveau régime et se rallient à al-Nasir Yusuf, qui fait son entrée à Damas le 9 juillet 1250 et unifie la Syrie sous son autorité. Il occupe également sans difficulté Gaza, mais Aybak fait proclamer l'Égypte possession du calife de Bagdad et, fort de cette légitimité, envoie ses troupes occuper Gaza en octobre 1250. Le 11 décembre 1250, l'armée d'al-Nasir quitte Damas en direction de l'Égypte. Elle rencontre l'armée mamelouke à Abbâsa le 2 février 1251 et la bataille commence à tourner en faveur des Syriens quand les Mamelouks de Damas désertent et se rallient à Aybak.
En 1255, Aybak subit une révolte d'une partie des Mamelouks et certains d'entre eux, dont Baybars, se réfugient à Damas qu-ils veulent entraîner à la guerre contre l'Égypte, mais le calife intervient encore en faveur de la paix et Aybak cède même toute la Palestine musulmane à Yusuf, et les deux sultans concluent une trêve de dix ans. Quatre ans plus tard, un autre danger survient : les Mongols, conduits par Hülagü, envahissent le monde musulman, prennent Bagdad, mettent fin au califat abbasside, puis envahissent la Syrie et prennent Alep (janvier-février 1260) puis Damas (mars-avril 1260). Al-Nasir Yusuf a préféré fuir les Mongols plutôt que défendre ses villes, mais, au moment d'entrer en Égypte, préfère se rendre aux Mongols plutôt que de se livrer aux Mamelouks. Kitkuba, le lieutenant de Hülagü, lui promet de le réinstaller comme sultan à Damas quand la conquête de l'Égypte sera achevée. Mais ce sont les Mamelouks qui battent les Mongols à Ayn djâlût le 3 septembre 1260, les repoussent et occupent la Syrie musulmane mettant définitivement fin à la dynastie ayyoubide.
Les Danichmendides forment une dynastie turque convertie à l'Islam, qui a régné aux XIe et XIIe siècles, sur une partie de l'Anatolie, au moment des premières invasions turques, par les Grands Seldjoukides, après la défaite des Byzantins à la bataille de Manzitkert en 1071, contre le Seldjoukide Kilitch Arslan. Cette dynastie laisse ensuite la place aux Seldjoukides de Rum.
Ghâzi Ahmad Bey s'est vu attribuer la mission de conquérir l'Anatolie au profit des Seldjoukides. Il s'empare de la région des fleuves Kizilirmak et Yesilirmak. Il a été surnommé Danichmend (instruit) parce qu'il avait été enseignant chez les Turkmènes. Le centre du pouvoir de ces Turkmènes se situe aux environs de Tokat, Amasya et Sivas.
En 1086, lorsque le sultan Seldjoulide de Rum Sulayman Ier Shah décède, Ghâzi Ahmad peut renforcer son pouvoir. Avant 1097, il s'empare de Niksar. Il profite des luttes intestines entre les émirs d'Anatolie pour étendre ses propres domaines. Il participe aux luttes contre les croisés aux côtés de Kilitch Arslan. Au mois d'août 1100, il fait prisonnier le prince Bohémond Ier d'Antioche. En 1103, il conquiert Malatya.
La relation avec Kilitch Arslan Ier devient tendue car ce dernier libère Bohémond sous prétexte de santé. Il s'ensuit une guerre entre eux et Ghâzi Ahmad meurt au combat en 1106.
En 1107, Kilitch Arslan Ier profite du décès de Ghâzi Ahmad pour prendre Malatya. Kilitch Arslan Ie meurt la même année. Gümüshtegin Ghâzi, qui a succédé à son père, se trouve mêlé aux querelles de successions parmi les Seldjoukides. Il prend parti de son gendre Masûd Ie et participe à son couronnement à Konya en 1116. Il prend Kayseri et Ankara en 1127, ce qui fait des Danichmendides les princes les plus puissants d'Anatolie. Il combat les Arméniens en Cilicie et contraint le roi Léon Ier à se soumettre (1131). Il acquiert ainsi un prestige tel auprès du calife abbasside de Bagdad al-Mustarchid que celui-ci lui attribue le titre de "malik". Gümüshtegin Ghâzi meurt en 1134, son fils Malik Muhammad Ghâzi lui succède.
Muhammad Ghâzi poursuit le combat contre les croisés et contre les rois de Petite-Arménie. Il meurt en 1142. Les querelles autour de la succession provoquent l'éclatement du royaume. Le royaume est alors partagé entre ses deux frères, Nizam ad-Dîn Yaggi Basan à Sivas et Ayn ad-Dîn Gümüshtegin à Malatya et Elbistan, et son fils Zunnun qui prend Kayseri. Le sultan de Rum Kilitch Arslan II va savoir profiter de cette division des Danichmendides. Après la mort de Yaghi Basan, il intervient dans les affaires de la branche de Sivas à plusieurs reprises. Il prend Kayseri en 1169.
Zunnun revient au pouvoir à Sivas avec l'aide de l'émir de Syrie Nûr ad-Dîn, c'est alors qu'il prend le titre de Nâsir ad-Dîn Muhammad. La mort de Nûr ad-Dîn en 1174, laisse le champ libre à Kilitch Arslan II, qui tue Zunnun et s'empare de son royaume.
À Malatya, le dernier Danichmendide ne règne que comme vassal des Seldjoukides jusqu'en 1178. Les Danichmendides suivants se mettent au service des Seldjoukides, qui vont dominer l'Anatolie pendant le XIIIe siècle.
Plusieurs Mosquées encore existantes sont l'œuvre des Danichmendides à Niksar, Kayseri ou Sivas, des écoles théologiques (madrasa) à Tokat (1151) et à Niksar (1157), ainsi que des mausolées, dont celui de Ghâzi Ahmad à Niksar.
Sivas (maliks) | Danichmend Ghâzi Ahmad (1071-1106) | |
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| Gümüshtegin Ghâzi 1106-1134) | |
| Nizam ad-Dîn Yaghi Basan (1104-1134) |
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| Muhammad Ghazi (1134-1142) |
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Zunnun (1142) (1172-1174) | |
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Nizam ad-Dîn Yaghi Basan (1142-1164) |
Ibrahim (1166) | | |
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Djamal ad-Dîn Ghazi (1164-1166) |
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Shams ad-Dîn Ismaïl (1166-1174) |
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Maltaya et Ebistan (émirs) |
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Ayn ad-Dîn Gümüshtegin (1142-1152) | |
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Dhu l-Qarnayn (1152-1162) | |
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Nâsir al-Dîn Muhammad (1162-1170) (1175-1178) |
Fakhr al-Din Qâsim (1170-1172) |
Afrîdûn (1172-1175) |
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1178 : Conquête par les Seldjoukides de Rum |
Les Artuqides étaient une dynastie de Turcs Oghüz qui dominaient l'Anatolie Est (Diyarbakir) et dans le Nord de la Syrie et de l'Iraq au XIe et XIIe siècles.
Les deux branches principales de la dynastie régnèrent à Hasankeyf entre 1102 et 1234 et Mardin entre 1106 et 1186, puis à Mayyäfâriquîn (Silvan), comme vassales jusqu'en 1409. Il y avait aussi une troisième branche qui a acquis Harput en 1112 et était indépendante entre 1185 et 1234.
La dynastie a été fondée par Artuq ibn Aksab (fils d'Eksuq) un guerrier issu des tribus turkmènes, d'abord sous le commandement de Malik Shah Ier et plus tard au service du roi Seldjoukide de Damas, Tutush Ier, frère de Malik Shah Ier.
En 1086, Artuq a été nommé gouverneur de Jérusalem par Tutush, qui avait arraché la ville aux Fatimides en 1078, sous le règne d'al-Mustansir Billah.
À la mort d'Artuq en 1086, le territoire de Diyarbakir (Amida) passa à son fils Söqmân, et celle de Silvan (Mayyâfâriqîn) et Mardin à un deuxième fils Ilghâzi.
À la mort, en 1092, du sultan seldjoukide Malik Shah Ier, les Artuqides furent menés dans la région anatolienne-syro-iraqienne de la Djéziré, par Tutush. Ils l'avaient soutenu dans son conflit dynastique entre 1092-1095. À la mort de Tutush, les Artuqides furent pris en charge par son fils Ridwan d'Alep contre son frère Dukak ibn Tutush, roi seldjoukide de Damas, mais Ilghâzi, qui commandait l'une des deux branches de la famille artuquide, était, pendant une certaine période, au service de Muhammad, fils du sultan seldjoukide Malik Shah.
En 1098, le vizir fatimide al-Afdal Shahan shah, fils de Badr al-Djamali, a repris Jérusalem au nom du calife fatimide al-Mustali et expulsa Söqman et Ilghâzi. Mais l'année suivante, les croisés reprennent encore une fois la ville aux Fatimides.
Les deux frères assurent, néanmoins, leur pouvoir à Diyarbakir, Mardin et Hasan keyf, dans la région de la Djéziré où ils sont entrés en conflit avec le sultanat de l'Empire seldjoukide. Söqman de Mardin vainc les croisés à la bataille de Harran en 1104.
À la mort de Söqman, son frère Ilghâzi, lui succède à Mardin, tout en continuant d'étendre les possessions des Artuqides ; il a pris Mayyâfâriqin entre 1117 et 1126 et, à la demande du cadi ibn al-Khashshab, en 1118, impose son contrôle sur Alep ; mais en 1119 Ilghâzi est vaincu par les croisés de la principauté d'Antioche à la bataille de "Ager sanguinis". En 1121, une alliance entre Seljoukides et Artuqides, commandée par Ilighâzi, est battue en Géorgie, à la bataille de Didgori.
À la mort d'Ilghâzi en 1122, son neveu Balak II n'a hérité que d'Alep gouvernée par ibn al-Khashshab ; mais ce dernier est assassiné en 1125, et la ville tombe sous le contrôle de Zengi, atabeg de Mossoul.
Après la mort de Balak, les Artuqides sont divisés en deux branches : les descendants d'Ilghâzi à Mardin et Mayyâfâriqîn et les descendants de Söqman à Hisn Kayfâ (Hasan keyf) puis à Harput et enfin à Amida (Diyarbakir).
Shams al-Dawla Sulayman, fils d'Ilghâzi, qui a succédé à son père à Mayyâfâriqîn, est mort en 1129-1130, tandis qu'un autre fils d'ILghâzi, Timür Tash de Mardin lui succède. Amida passe à Dâwûd, fils et successeur de Söqman. À partir de là les deux branches artuqides sont restées distinctes pour environ deux siècles.
En 1144, meurt Dâwûd Rukn ad-Dawla à Hasan keyf. Il est remplacé par son fils Qara Arslan qui s'allia avec Jocelin II d'Édesse contre Zengi, mais en 1444, profitant de l'absence de Jocelin, Zengi reprit Édesse et Qara Arslan devint son vassal.
Le fils de Qara Arslan, Nûr al-Dîn Muhammad (1167-1185), allié au sultan ayyoubide Saladin contre le sultan seldjoukide de Rum, Kilitch Arslan II, dont la fille avait épousé l'Arqukide Nûr al-Dîn Muhammad. Et grâce à un accord de paix avec Kilitch Arslan, Saladin annexe le territoire artouqide, dont les seigneurs étaient vassaux de Mossoul. Saladin va encore étendre sa domination sur Mossoul, avec l'aide artuqide.
La dynastie artuqide dominait encore la Mésopotamie du Nord, mais sa puissance a diminué sous la domination ayyoubide.
Quant à la branche de Hasan Keyf, elle s'est installée à Diyarbakir qu'elle avait conquise en 1198 ; mais la branche fut détruite en 1234 par les Ayyoubides, après leur alliance avec les Seldjoukides.
La branche de Harput, fut quant à elle détruite par les Seldjoukides.
La branche de la dynastie établie à Mardin et Mayyâfâriqîn, vassale des Ayyoubides et du sultanat de Rum a pu échapper aux luttes entre ceux-ci et les Khwârezm-Shahs ; mais en 1260, elle se déclara vassale des Ilkhans puis de l'empire timouride.
La dynastie artuqide prit fin en 1408, quand les Kara Koyunlu occupèrent Mardin.
Les Dynasties des Artuqides | ||
Artuq ibn Aqsab commandant seldjoukide (1090-1102) |
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Branche de Diyarbakir (Amida) | Branche de Harput | Branche de Mayyâfâriqîn (Sylvain) et de Mardin |
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Conquise par les Ayyoubides 1232-1233 |
Conquise par les Seldjoukides en 1234 |
Conquise par les Kara Koyunlu en 1408 |
Dynastie turque d'atabegs, née du morcellement de l'empire des Grands Seldjoukides, qui eut pour capitale Damas, mais qui fut de brève durée.
Fondée par Tughtegin, le tuteur ou atabeg de Duqâq, fils du prince seldjoukide Tutush et le dernier souverain de la brève lignée des Seldjoukides de Syrie. La dynastie des Bourides tire en fait son nom du fils de Tughtegin, nommé Taj al-Muluk Buri, qui régna de 1128 à 1132. Buri eut pour successeurs ses trois fils : Shams al-Muluk Ismaïl (1132-1135), Shihab ad-Dîn Mahmûd (1135-1139) et Djamal ad-Dîn Muhammad (1139-1140) ; puis un petit-fils Mudjir ad-Dîn Abaq (1140-1154), qui laissa le pouvoir à son propre atabeg, Mûin ad-Dîn Unur entre 1140 et 1149. Mais le règne principal, avait été, de 1104 à 1128, celui de Tughtegin lui-même, l'ancien mamelouk devenu conseiller d'un pupille dont il avait épousé la mère, Safwat al-Mulk, et dont il recueillit ensuite l'héritage. Ce fut lui qui sut mener avec succès, pendant quelques années, une véritable politique d'indépendance de la Syrie du Sud face à l'État rival du sultan d'Alep, Ridwan, frère de Duqâq, face au royaume chrétien de Jérusalem avec lequel il put conclure des alliances temporaires et face au pouvoir califal de Bagdad qui lui conféra en 1116 une investiture officielle. Il échoua toutefois à secourir une ville importante pour le destin de la région, la place côtière de Tyr qui fut investie par les Francs et contrainte à capituler en 1124.
Après lui devint de plus en plus difficile l'existence de la principauté de Damas qu'il avait constituée et dont il laissa à ses descendants la tâche de la défendre contre de nouvelles ambitions, celle de Zengi. La puissance des Bourides était désormais menacée à la fois par les Francs, qui mirent le siège devant Damas en 1148, et par les princes musulmans de la Syrie du Nord qui avaient supplanté les Seldjoukides, à savoir Zengi et son fils Nûr al-Dîn. Certes, les maîtres de Damas n'hésitèrent pas, en certaines occasions, à s'allier à nouveau avec les Francs pour écarter les attaques de leurs rivaux ; mais ils finirent par capituler devant les offensives de Nûr al-Dîn qui, le 10 avril 1154, entra dans Damas, une cité marquée par ses luttes intestines, mettant fin à la dynastie bouride. Pendant toute cette dernière période, en effet, les Bourides, qu'acceptait mal la bourgeoisie locale, s'étaient heurtés à des milices urbaines, d'une part, et à des groupes ismaïliens, d'autre part, qui avaient largement contribué à les affaiblir.
Généalogie des Bûrides |
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Tughtegin (1104-1128) | |
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Buri Taj al-Muluk (1128-1132) | |
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| Shams al-Dîn Muluk Ismaïl (1132-1135) |
| Shihab al-Dîn Mahmûd (1135-1139 |
| Djamal al-Dîn Muhammad (1139-1140) |
Mûin ad-Dîn Unur -----------> | | Mudjir ad-Dîn Abaq (1140-1149) (1150-1154) |
Le Khwarezm, riche province médiévale islamisée de l'Asie centrale, qui est aujourd'hui divisée entre la république d'Ouzbékistan et la république du Turkménistan.
Les Khwarezmchahs ou "rois du Khwarezm", nom porté par les membres des dynasties successives, qui dominèrent le Khwarezm médiéval et dont les plus célèbres, venus au pouvoir à la fin du XIe siècle et à la veille de l'invasion mongole, étaient devenus les maîtres du plus puissant empire d'Orient. Ils furent tour à tour soumis à la suzeraineté nominale des Samanides, des Seldjoukides, des Ghaznévides, des Karakhanides, avant de prendre la place de première puissance territoriale de l'Orient musulman à la veille des conquêtes mongoles.
La première de ces dynasties, celle des Afrighides de Kâth, régnait dans la région au moment des grandes conquêtes arabo-islamiques et, après avoir reconnu la suzeraineté des califes, passa sous celle des Samanides au début du Xe siècle. Elle n'était devenue musulmane qu'au début du IXe siècle. En 995, le dernier Afrighide est tué par l'émir de Gurganj qui fonde la IIe dynastie.
La deuxième, celle des Mamunides, d'abord princes de Gurganj (Ourguentch), ne se maintint que de 995 à 1017 tout en ayant brillé d'un vif éclat incarné par le renom de sa capitale et de sa cour. Des savants tels Ibn Sina (Avicenne) et al-Bîrûni en assurèrent largement le prestige intellectuel. Sa disparition est liée aux pressions exercées par les Ghaznévides, en particulier une alliance matrimoniale entre le sultan de Ghazni et le Chah du Khwarezm, qui entraînant l'assassinat de ce dernier en 1017, poussa Mahmûd de Ghazni à intervenir. Il occupe alors le Khwarezm, où le gouverneur qu'il laisse après son départ fonde la IIIe dynastie.
La troisième, d'aussi brèves durées (1017-1041), correspondit après les campagnes victorieuses de Mahmûd le Ghaznévide au Khwarezm, aux efforts d'indépendance déployée par une famille de "gouverneurs" qu'il avait mises en place ; elle ne compta comme membres que le mamelouk Ghaznévide Altuntâsh et ses deux fils. L'intervention des Seldjoukides mettra y fin. Le Khwarezm eut alors pour illustres gouverneurs les fils du vainqueur Alp Arslan et son célèbre ministre Nizam al-Mulk, sans toutefois qu'une nouvelle dynastie apparaisse. Son fils et successeur Malik Chah, y nomma comme gouverneur en 1097, un de ses esclaves officiers, Anûchtigin, qui devint le fondateur de la IVe dynastie (1097-1220) : celle qui fit la gloire de l'empire du Khwarezm.
Cette quatrième dynastie, qui étendit sa domination de 1077 à 1220, se développa à partir de l'intégration du pays aux possessions des Seldjoukides d'Iran en 1041 et de la nomination par le sultan Malik Shah, vers 1077, de son mamelouk Anûshtigîn comme gouverneur titulaire de ce territoire. Elle fut la plus importante par sa durée, par son expansion territoriale et son rayonnement culturel.
En 1097, Qutb al-Din Muhammad, fils d'Anûshtighîn, fut désigné comme Khwarzemchah. Il se conduisit en fidèle vassal de Sandjar et la même politique fut adoptée par son fils Atsiz qui réussit toutefois à soumettre à son autorité les Turkmènes voisins.
Quand Sandjar avait été vaincu par les Kara Khitaï (1141) Atsiz, s'était rallié aux vainqueurs de Sandjar et les Khwarezmchahs eurent alors une plus grande liberté d'action. Il laissa à son successeur, Il-Arslan (1156-1172) une situation assez florissante. Les chahs du Khwarezm sont désormais indépendants et assez solidement établis.
À la mort de Sandjar, l'Iran était en pleine anarchie. Le successeur d'Il- Arslan, Takach (1174-1220) en profita et se porta en direction de l'ouest, atteignit l'armée du sultan Toghrül III près de Rayy en 1194 et remporta une facile victoire. Les Grands Seldjoukides disparurent de l'histoire et les Khwarezmchahs devenaient empereurs d'Iran.
Quand Takach mourut, il ne fallut pas plus de deux décennies à son fils, Ala al-Dîn Muhammad (1200-1220), pour porter le nouvel empire à son apogée. Il commença par attaquer les Ghûrides, occupa le Khûrasan et presque tout l'Iran, en luttant avec succès contre les Ghûrides qu'il vainquit dès 1204, mais dut cependant attendre 1215 pour s'emparer de Herat, et 1219, pour enlever Ghazni. En 1207, il envahissait la Sogdiane et écrasait ses anciens alliés, les Kara-Khitaï, qui disparurent sans laisser de traces. Il put achever sans souci la conquête de tout l'Iran (1212-1219). Quant aux Karakhanides qui espéraient recouvrer leur indépendance à cette occasion, ils furent déposés en 1208.
En deux décennies, les Chahs du Khwarezm avaient fait disparaître Seldjoukides, Ghûrides, Kara-Khitaï et Karakhanides.
Peu après, la chute de la dynastie, marquée par l'épopée guerrière de Jalâl al-Din Mangouberti, eut pour cause directe l'arrivée des Mongols sur la scène politique de l'Iran.
En l'an 1218, Ala al-Dîn Muhammad avait conclu un accord de paix et de libre circulation des caravanes en Eurasie, avec Gengis Khan, qui venait d'être élu par son peuple. Or, cette même année 1218, l'accord à peine conclu, une immense caravane venant de Mongolie avait été arrêtée aux frontières du Khwarezm, à Otrar, et ses hommes massacrés. Gengis Khan décida de châtier le parjure. Il rassembla une immense armée et attaqua en septembre 1219, sur Otrar, la ville du Sir-Daria, où avait eu lieu le crime. Il marcha sur Boukhara et Samarcande, qu'il enleva en février et en mars 1220. Ala al-Dîn pris de panique s'enfuit en direction de l'Ouest, poursuivi par un escadron de l'armée mongole. Il devait mourir au cours de cette fuite effrénée dans une petite île de la mer Caspienne. Gengis Khan envahit alors l'Iran, aidé de son fils Tuluï, vainquit en novembre 1221, Jâlal al-Dîn, qui avait pris la relève de son père, et l'obligea à se réfugier aux Indes. Il repartit ensuite en Mongolie ou il arriva en 1225. IL mourra peu après.
Jâlal al-Din, après sa défaite sur l'Indus, s'était réfugié aux Indes. Il revint en Iran dès que Gengis Khan fut parti et n'eut aucun mal à reconstituer l'empire de son père (1224).
Au cours de l'hiver 1230-1231, les Mongols revinrent pour conquérir l'Iran. Jâlal al-Din s'enfuit dans le Diyarbakir, où il fut rejoint et assassiné (15 août 1231). La dynastie des Khwarezmchahs prenait fin et la conquête de l'Iran par les Mongols commençait. Hülegü (1253-1265), l'un des frères du Grand Khan de l'époque, Mongka, fonda alors la dynastie des Ilkhans, qui gouvernera l'Iran pendant trois-quarts de siècle.
Les Grands Khwarezmchahs |
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Anûshtigîn : | 1077-1097 | |
Qutb al-Dîn Muhammad : | 1097-1127 | |
Ala al-Dîn Atsiz : | 1127-1156 | |
Il-Arslan : | 1156-1172 | |
Ala al-Dîn Takash : | 1172-1200 | |
Ala al-Dîn Muhammad : | 1200-1220 | |
Jalâl al-Dîn Munguberti : | 1220-1231 | |